Une infraction génère toujours de la souffrance chez celui qui en est victime. Cette souffrance peut découler d’une atteinte à l’intégrité physique, psychique, sexuelle ou de la perte d’un proche. C’est ce que l’on appelle en droit le tort moral.
En droit suisse, l’auteur doit réparer cette souffrance par une réparation morale qui prend systématiquement la forme d’une indemnisation financière.
Dans le cadre du procès pénal, le prévenu jugé coupable de l’infraction dont il est accusé sera principalement condamné à une peine. Mais il pourra également être condamné à réparer le tort moral causé à sa victime, pour autant que celle-ci en demande la réparation.
Les montants alloués au titre de la réparation morale s’élèvent souvent à plusieurs milliers, voire dizaine de milliers de francs. Mais que se passe-t-il lorsque l’auteur ne paye pas cette réparation morale à sa victime, soit parce qu’il s’y refuse, soit parce qu’il n’en a simplement pas les moyens ?
C’est là qu’intervient la Loi fédérale sur l’aide aux victimes d’infractions (LAVI). Entre autres dispositions tendant à soutenir les victimes d’infractions, la LAVI prévoit précisément que l’aide aux victimes comporte aussi la réparation morale. Ainsi, afin d’éviter que la souffrance morale des victimes ne soit jamais réparée du fait de la défaillance de l’auteur, l’Etat va se substituer à ce dernier et verser lui même une forme de réparation morale. Selon l’art. 4 LAVI, l’intervention de l’Etat est ainsi subsidiaire et subordonnées à la condition que ” l’auteur de l’infraction ou un autre débiteur ne versent aucune prestation ou ne versent que des prestations insuffisantes “.
Il est toutefois important de souligner que la réparation morale selon la LAVI n’est qu’une aide symbolique et plafonnée versée par l’État ” Elle n’est pas l’expression de la responsabilité de l’auteur, mais de la solidarité de la collectivité publique à titre subsidiaire. Ainsi, le législateur a expressément prévu pour la réparation morale au sens de la LAVI des sommes plus faibles que pour la réparation morale de droit civil lorsque la créance ne peut être réglée par l’auteur “.
Afin de guider les autorités et les professionnels du droit dans la fixation de ces indemnités pour tort moral selon la LAVI, l’Office fédéral de la justice a édité au début du mois d’octobre 2019 un Guide relatif à la fixation du montant de la réparation morale selon la loi sur l’aide aux victimes. Ce guide cristallise les modes de fixation des indemnités pour tort moral selon la LAVI et les plafonds en fonction des différents types d’atteinte, à savoir :
I. les victimes ayant subi une atteinte grave à leur intégrité physique;
II. les victimes ayant subi une atteinte grave à leur intégrité sexuelle,
III. les victimes ayant subi une atteinte grave à leur intégrité psychique;
IV. les atteintes graves à l’égard des proches de la victime.
Voici donc les différentes fourchettes d’indemnisation prévues par le Guide, classées selon le type d’atteinte et sa gravité :
I. Atteintes à l’intégrité physique
II. Atteintes à l’intégrité sexuelle
III. Atteintes à l’intégrité psychique
IV. Atteintes aux proches de la victime
Que la douleur et le manque puissent être aussi schématiquement tarifés questionne immanquablement. Cependant, dans l’intérêt des victimes, ce guide a le mérite d’offrir transparence, prévisibilité et donc une forme d’apaisement dans un domaine des plus opaque : La mesure de la souffrance ou de l’incommensurable.