L’art. 92a du Code pénal suisse consacre le droit à l’information des victimes, des proches de la victime et des tiers ayant un intérêt digne de protection, qui peuvent obtenir des informations sur l’exécution de la peine du condamné et sur sa libération.
Ces personnes peuvent ainsi demander par écrit à l’autorité d’exécution qu’elle les informe :
- Du début de l’exécution d’une peine ou d’une mesure par le condamné, de l’établissement d’exécution, de la forme de l’exécution, si celle-ci diverge de l’exécution ordinaire, de l’interruption de l’exécution, de l’allègement dans l’exécution, de la libération conditionnelle ou définitive et de la réintégration dans l’exécution;
- Sans délai, de toute fuite du condamné ou de la fin de celle-ci.
Avant de rendre sa décision l’autorité d’exécution doit entendre le condamné. L’autorité peut refuser de renseigner uniquement si un intérêt prépondérant du condamné le justifie.
Dans un arrêt 6B_330/ 2019 du 22 août 2019, le Tribunal fédéral rejette le recours d’une détenue, qui s’opposait à ce que des informations concernant l’exécution de sa peine soient transmises à la mère de la victime. En l’espèce, la détenue avait été condamnée en 2015 par le Tribunal cantonal du canton de Genève à une peine privative de liberté de six ans pour complicité d’assassinat. En 2018, la mère de la victime avait demandé à l’autorité compétente en matière d’exécution des peines d’être informée de la libération de l’intéressée. Elle avait notamment motivé sa requête par la volonté d’éviter une éventuelle rencontre avec la condamnée. L’autorité compétente avait accepté d’informer la requérante de toutes les décisions essentielles s’agissant de l’exécution de la peine, en particulier concernant la libération ou une éventuelle fuite de la condamnée. Contre cette décision, confirmée par le Tribunal cantonal, la détenue avait recouru au Tribunal fédéral.
Dans un premier moyen, le recourante s’opposait à la transmission des informations en raison de la faible probabilité qu’une rencontre inopinée avec la mère de la victime puisse survenir, vu qu’en cas de libération elle vivrait à quelques dizaines kilomètres de son domicile. Le Tribunal fédéral rejette cet argument et confirme sur ce point à la position de l’autorité inférieure : » Or, comme l’a relevé l’autorité précédente, l’idée qu’une telle rencontre puisse se concrétiser – tandis que les deux intéressées vivraient à quelques dizaines de kilomètres de distance – n’a rien d’extravagant (…) La perspective, pour un ayant droit, de croiser fortuitement le condamné constituait d’ailleurs l’un des principaux éléments ayant justifié l’adoption de l’art. 92a CP « .
Dans un second moyen, la recourante soutenait qu’une transmission d’informations ne pouvait se justifier que lorsque le condamné aurait eu un « comportement négatif » à l’encontre de l’ayant droit, notamment en proférant des menaces à son égard. Sur ce point le Tribunal fédéral donne également tort à la recourante en soulignant : » Or, une telle exigence ne ressort aucunement de l’art. 92a al. 3 CP, ni ne correspond à la volonté du législateur, lequel a entendu permettre exceptionnellement à l’autorité de refuser la transmission d’informations en présence d’un intérêt prépondérant du condamné (cf. consid. 2.1 supra). On peut ajouter que la doctrine ne préconise pas d’appliquer des critères plus stricts en la matière, mais considère qu’un refus, de la part de l’autorité, pourrait se justifier lorsque l’ayant droit risquerait de se venger, de s’en prendre physiquement au condamné, d’entraver sa réinsertion ou lorsque celui-ci aurait déjà, par le passé, mésusé de renseignements de ce type« .
Ce premier arrêt du Tribunal fédéral rendu en application de l’art. 92a CP confirme l’application restrictive du principe suivant : la transmission des informations d’exécution de peine à la victime ou a ses proches est la règle et le refus l’exception.